samedi 8 août 2009

[Présent] Sur les traces du Bienheureux Urbain V

Yves Chiron - Présent, 8 août 2009

2010 verra le VIIe centenaire de la naissance du pape Urbain V, l’avant-dernier pape français et le dernier pape d’Avignon, que le pape Pie IX a béatifié pour ses grandes vertus.

Urbain V est-il du Gévaudan ou des Cévennes ? Il est né à Grizac, au sud de la Lozère, dans le diocèse de Mende (qui était capitale du Gévaudan). Mais Grizac est aujourd’hui dans le Parc national des Cévennes et c’est non loin de là, à Pont-de-Montvert, qu’a commencé la guerre des Camisards, par l’assassinat de l’abbé du Chaila, le 24 juillet 1702.

Cet été peut être l’occasion d’un voyage, seul ou en famille, sur les traces d’Urbain V – Guillaume de Grimoard. L’itinéraire pourra être établi en fonction de la chronologie ou d’après une logique plus géographique, mais il sera essentiellement lozérien et bénédictin.

Le berceau familial du futur Urbain V est le château de Grizac, bâti par son père, et admirablement restauré ces dernières décennies par un descendant de la famille, le marquis de Laubespin. On y accède depuis Pont-de-Montvert, à 9 kilomètres, par une petite route. Arrivé au hameau de Grizac, il est plus prudent de descendre au château, en contrebas, à pied. La vue est magnifique, le château en pierres est austère et resserré. Le voyage mérite aussi le détour pour l’exposition sur Urbain V qui s’y tient chaque année,  tous les jours (sauf le lundi) de 15 à 19 heures.

L’exposition a été conçue et réalisée par Anne Trémolet de Villers (auteur, entre autres, du beau volume illustré Eglises romanes oubliées du Gévaudan, Les Presses du Languedoc, 1998). De grands panneaux, où textes et illustrations alternent, racontent les origines de la famille de Grimoard, l’enfance et la jeunesse de Guillaume, son entrée dans la vie bénédictine au Monastier, sa « carrière » monastique (il sera abbé de S.-Germain d’Auxerre puis de Saint-Victor de Marseille), les missions diplomatiques en Italie que lui confie Innocent VI, puis les grandes œuvres du pontificat (de 1362 à 1370).

Si l’on va au Monastier, au sud de Marvejols, on ne trouvera qu’une partie du monastère du Saint-Sauveur. Mais l’église, fortifiée, est intacte. Une belle exposition permanente, à laquelle, là encore, Anne Trémolet de Villers a apporté sa collaboration, retrace les origines de l’abbaye – fondée en 1062 par l’évêque de Mende et ses frères – et son histoire.  Le futur Urbain V  y a accompli son noviciat et y a été ordonné prêtre. Devenu pape, il fera restaurer et fortifier l’église et dotera le monastère d’une bibliothèque et de cloîtres aujourd’hui disparus.

Le Monastier est un exemple-type de ce qu’était l’irradiation sociale de la vie monastique au Moyen-Age. Les moines bénédictins ont introduit la vigne et la culture du safran dans la vallée de la Colagne. Ils accueillaient  aussi les pèlerins qui allaient à Saint-Jacques de Compostelle et qui, voulant éviter le plateau de l’Aubrac, avaient emprunté la vallée.Ils accueillaient aussi ceux qui allaient vers des sanctuaires plus proches : Notre-Dame de Quézac, Saint-Gilles du Gard, Saint-Guilhem du désert.

Un pape bienfaiteur

Il y aurait beaucoup à dire sur le pontificat d’Urbain V, réformateur, réconciliateur, pape resté moine dans l’âme et dans l’habit. On se contentera de relever encore d’autres lieux lozériens marqués par son souvenir et sa bienfaisance. On peut encore voir, au sud de Saint-Germain-du-Teil, sur un piton rocheux dominant le Lot, les ruines du château de Montferrand (château où est née sa mère et où ses parents se sont mariés). À Bedouès, non loin de Grizac, on peut voir l’église où le jeune Guillaume venait à la messe et une collégiale qu’il a fait bâtir et où ses parents sont enterrés. À Ispagnac, sur la charmante place du village, et à côté d’un excellent libraire régional, l’église romane aux pierres ocres offre, dans ses vitraux contemporains, le double souvenir d’Urbain V et de Pie IX (qui l’a béatifié en 1870).

On pourrait encore évoquer Quézac, sa vierge miraculeuse, la collégiale voulue par Urbain V et l’admirable pont à dos d’âne qu’il a fait construire. Mais on ne saurait oublier Mende, capitale du Gévaudan, aujourd’hui préfecture de la Lozère. Urbain V y a fait reconstruire la cathédrale qui abrite une de ces Vierges noires qui attiraient tant de pèlerins. L’édifice a connu des transformations importantes, les dévastations de l’huguenot Mathieu Merle, à la fin du XVIe siècle, obligeant à des reconstructions et à une nouvelle consécration. Sur le parvis, une grande statue, en bronze, inaugurée en 1874, rend hommage « Au bienheureux Urbain V, pape de 1362 à 1370, bienfaiteur du Gévaudan ».

Yves CHIRON