samedi 14 novembre 2009

[Présent] Mgr Zoltan Meszlenyi, évêque martyr

Yves Chiron - Présent, 14 novembre 2009

La récente béatification de l’évêque Meszlenyi, martyr du régime communiste en 1951, a donné lieu à de nombreux articles qui, comme souvent, étaient plus ou moins la reproduction d’une brève dépêche d’agence. Le martyr de Mgr Meszlenyi devient ainsi presque une chose abstraite. Les sources disponibles permettent pourtant de saisir de plus près la réalité et la totale injustice de la persécution communiste.

Zoltan Lajos Meszlenyi était né le 2 janvier 1892 à Hatvan, dans une famille profondément chrétienne. Entré au séminaire d’Esztergom, il a ensuite été envoyé à Rome pour poursuivre ses études ecclésiastiques. Il étudie à l’Université pontificale grégorienne, où il obtiendra un  diplôme en droit canon et sera reçu docteur en philosophie et en théologie. Au cours de ses études romaines, il est ordonné prêtre le 28 octobre 1915.

À son retour en Hongrie, en 1917, ses capacités intellectuelles et sa vaste connaissance des langues étrangères (outre le grec et le latin, il maîtrisait l’anglais, l’allemand, l’italien et le français), permirent qu’il fût affecté au bureau central de l’archevêché d’Esztergom. L’évêque, Mgr Janos Csernoch, qui portait aussi le titre de Primat de Hongrie, avait été nommé en 1912 ; il resta en fonction jusqu’en 1927. Son successeur, Jusztinian Seredi, Primat de Hongrie de 1927 à 1945, conserva d’abord Meszlenyi dans ses fonctions puis, en 1937, il en fit un de ses évêques auxiliaires.

Consacré évêque le 28 octobre 1937, Mgr Meszlenyi se trouva associé à la charge pastorale du plus grand diocèse de Hongrie qui comptait alors 800.000 catholiques, 167 paroisses, 520 prêtres diocésains, 671 religieux prêtres et près de 3.000 religieux et religieuses.

Après les épreuves de la guerre, la pression du PCH (Parti Communiste Hongrois) puis sa progressive prise de pouvoir, soutenu par l’armée soviétique d’occupation, allaient jeter l’Eglise hongroise dans des décennies de tourments et de persécutions.

Les « ténèbres du mal »

En octobre 1945, Mgr Joseph Mindszenty succéda au cardinal Seredi comme archevêque d’Esztergom et Primat de Hongrie. Il exposa son programme en termes simples : « Rome et ma Patrie seront les deux étoiles qui guideront ».
Depuis quelques mois déjà, l’offensive politique contre l’Eglise avait commencé. Sous le prétexte de « nationaliser » les grandes propriétés foncières et de les redistribuer, un décret gouvernemental, en date du 15 mars 1945, avait confisqué la plus grande partie des terres appartenant à l’Eglise. « Ce décret, ont expliqué Paul Bozsoky et Laszlo Lukacs, allait avoir de grosses conséquences sur l’activité extérieure et sociale de l’Eglise. Privés de leurs ressources habituelles, certaines institutions : monastères, hôpitaux, orphelinats, foyers de personnes âgées, collèges et lycées se trouvaient en péril ».

Parallèlement, la « nationalisation » des maisons d’éditions et des imprimeries, le rationnement du papier et la censure sévère qui dépendait du ministère de l’Intérieur (« citadelle des communistes »), allaient entraver les moyens d’expression et d’apostolat de l’Eglise.

On ne rapportera pas ici toutes les étapes de la persécution contre l’Eglise et tous les actes publics de la résistance spirituelle du cardinal Mindszenty. Finalement, le 26 décembre 1948 il fut arrêté. Après un procès bâclé et inique, les 3-5 février 1949, il fut condamné à la prison à vie pour atteinte à la sécurité de l’Etat, espionnage et trafic de devises.

L’heure de Mgr Meszlenyi avait sonné. En 1950, malgré l’opposition du gouvernement, les chanoines de la cathédrale d’Esztergom l’élirent comme vicaire capitulaire, chargé d’assurer le gouvernement du diocèse en l’absence de l’évêque légitime en prison.

Comme l’a dit Mgr Amato, préfet de la Congrégation pour les Causes des saints : « Mgr Meszlenyi, quoique mesurant les risques, accepta sa nomination avec promptitude et disponibilité. La répression du régime ne se fit pas attendre ».

Dix jours après sa nomination, il fut arrêté. Il subit interrogatoires, tortures, isolement à la prison de Recsk, puis, sans même avoir eu un simulacre de procès, il fut envoyé au camp de concentration de Kistarcsa, près de Budapest. Il y mourut le 4 mars 1951.

« Confronté au dilemme fidélité ou trahison », selon l’expression de Mgr Amato, Mgr Meszlenyi « confirma avec force sa fidélité à l’Evangile ». Ses persécuteurs communistes, depuis le plus haut niveau de l’Etat jusqu’à ses gardiens, étaient animés de l’odium fidei, « la haine envers Dieu et envers l’Eglise. Les ténèbres du mal qui n’acceptent pas la lumière du bien ». L’expression est, encore de Mgr Amato.

Yves CHIRON